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Observations de la Nature et du Ciel             ,            spectroscopie, astrophotographies, ...
26 janvier 2011

Le 27 janvier prochain sera le jour de Commémoration de la Shoah et de prévention des crimes contre l’Humanité

 

Le 27 janvier prochain auront lieu les commémorations du 66ème anniversaire de la libération du Camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau. On peut, à cette occasion, rappeler une leçon magistrale et infiniment émouvante du très grand professeur français de philosophie que fut Vladimir Jankélévitch, né en 1903 et mort en 1985 et utiliser le thème de la nostalgie pour présenter, à défaut d’expliquer, quelques notions fondatrices de sa pensée.

Jankélévitch, influencé par Bergson, ne s’est pas contenté d’être un disciple sage et fidèle. Il a au contraire développé une réflexion lumineuse notamment sur la problématique du temps, de ce temps humain trop humain qui pétrit nos existences et la nostalgie, bien sûr, entre dans ce champ de préoccupations. La composition du mot l’indique, la nostalgie c’est la douleur du retour. Quand elle s’applique à l’espace, à un ailleurs, elle est le mal du pays qui est provisoirement guérissable par le retour sur les lieux chéris. Mais quand elle s’applique à un jadis, la nostalgie se déploie alors à l’état pur car le temps passé est révolu à jamais et quoi que fasse le cœur nostalgique, il lui sera impossible de le revivre dans son effectivité (Jankélévitch dit : sa quoddité), comme lorsqu’il l’a vécu pour la première et aussi pour la dernière fois. Il se heurte alors à ce qui constitue l’essence intime de la temporalité que le philosophe appelle l’*Irréversible*. On ne peut pas remonter le temps, on ne peut aller qu’en avant et l’homme, qui est un être en constant devenir est « un irréversible en chair et en os », « un irréversible incarné ». Restent le souvenir, représentation du passé sous forme d’image qui n’est pas forcément liée à l’affectivité et surtout la nostalgie qui est, quant à elle, gorgée d’émotion, chargée d’affectivité et tissée jusque dans les moindres détails de ces réminiscences qui relient l’individu nostalgique à un passé qui ne reviendra plus et qui le charme et le désespère.

L’un des corollaires de la nostalgie telle que décrite ci-dessus réside dans le fait que le passé, revisité ou non, oublié ou non, se présente comme un conservatoire et un sanctuaire de tous les états et de toutes les actions que tous les êtres et tous les phénomènes ont engendrés au moment de leur effectivité et dont ils ont laissé une trace indélébile à jamais et pour les siècles des siècles à l’instant qui a suivi immédiatement leur apparition disparaissante.

Et paradoxalement, la mort, qui pourtant clôt définitivement toute destinée humaine, inscrit « l’avoir été » de ces destinées de façon ineffaçable dans le passé pour le présenter au futur de l’humanité et devant l’éternité. Dans son ouvrage intitulé « L’irréversible et la nostalgie », Jankélévitch écrit notamment : « Celui qui a vécu ne peut plus désormais ne pas être ; désormais ce fait mystérieux et profondément obscur d’avoir vécu est son viatique pour l’éternité. » C’est ce qu’il appelle l’*Irrévocable*.

Vladimir Jankélévitch opposait à l’Allemagne un refus métaphysique. Il refusait après 1945 de lire les penseurs allemands. L’immense mélomane qu’il était ne pouvait pas entendre la musique de Shubert sans penser qu’elle était jouée dans les camps au moment même où on pendait les prisonniers.

Et il pense à cette petite fille à la poupée de chiffon qui est montée en août 1942 dans un wagon à Drancy, qui a souffert de la soif et de la faim pendant quatre ou cinq jours, qui est arrivée à Auschwitz, qu’on a dirigée vers le vestiaire puis qui s’est déshabillée après avoir mis dans la poche de son vêtement la poupée de chiffon en se demandant si elle allait la retrouver, et qui est entrée toute nue dans la chambre à gaz … Jankélévitch dit alors que l’univers tout entier ne serait pas ce qu’il est si cette petite fille n’avait pas été. Et la monstruosité qui cherchait à effacer, à annihiler, n’est pas parvenue à détruire l’indestructible de « l’avoir été » de cette petite fille que le passé garde à tout jamais et qui a laissé la trace de ce qu’elle a effectivement vécu avant que l’immonde barbarie ne l’emporte.

Pardonner ? C’est justement le titre d’un petit livre paru en 1971 pour montrer l’imprescriptibilité des crimes nazis et l’homme Jankélévitch, au fond de son cœur, n’a probablement jamais pardonné le mal absolu, métaphysique qui avait été commis à l’égard du peuple juif. Pourtant, en 1967, le philosophe avait consacré un livre au pardon dans lequel il expliquait que le pardon est l’effet d’un amour infini qui doit être capable de pardonner l’impardonnable car il n’y a pas d’impardonnable pour le pardon.
Or, dans le cas présent, l’impardonnable c’est la barbarie nazie…Et à la fin de l’avertissement du livre de 1971, on peut lire : « Le pardon est fort comme le mal, mais le mal est fort comme le pardon. ».

Avant de nous quitter, Vladimir Jankélévitch a livré à ses étudiants et à ses lecteurs très nombreux les éléments de réflexion susceptibles de les aider à se forger librement une opinion grave et sincère sans chercher à diriger leur esprit, ni à les influencer. Et dans le silence de leur cœur conscient, confrontés au retentissement en eux de l’indicible de l’abomination et inspirés par la voix de la sagesse de l’amour, ils cherchent, sur la trace de leur maître, les voies d’une réconciliation.

Samuel Nathan

"Le bourreau tue toujours deux fois, la seconde fois par l'oubli" (Elie Wiesel)

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Elie Wiesel (7e homme couché sur la 2e rangée en partant du bas), lors de la libération du camp de Buchenwald ).  

 Il est déporté avec sa famille par les nazis à Auschwitz-Birkenau, puis Buchenwald. Il y perdra ses parents et sa sœur.

 

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Penser le XXe siècle :

 

Avec  le sens de la prophétie qui l’habitait, Victor Hugo faisait s’exclamer en ces termes euphoriques l’étudiant Enjolras dans ses Misérables (1862) : « Citoyens, le XIXe siècle est grand mais le XXe sera heureux. Alors plus rien de semblable à la vieille histoire, on n’aura plus à craindre comme aujourd’hui une conquête, une invasion, une rivalité de nations à main armée, une interruption de civilisation dépendant d’un mariage de rois, et l’échafaud et le glaive, et les batailles et tous les brigandages du hasard dans la forêt des événements. On pourrait presque dire : il n’y aura plus d’événements. On sera heureux ».

 

Un siècle plus tard, c’est un autre constant que lui opposent les philosophes. « Il n’y aura pas d’histoire universelle conduisant de la barbarie à l’humanité mais bien une histoire universelle conduisant à la bombe H », lui rétorque ainsi laconiquement Théodor Adorno. Que s’est-il passé entre l’utopie hugolienne et ce retour au réel « inhumain » ? Comment le XXe siècle a-t-il mis un abîme entre Victor Hugo et nous ? Comment pouvons nous penser cet abîme et donc ce siècle ? Tel est l’objet de cet ouvrage :

http://www.amazon.fr/Penser-xxe-siecle-Alain-Finkielkraut/dp/2730207139/ref=sr_1_14?ie=UTF8&qid=1296077969&sr=8-14


 

 

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